Portrait de Sandra Moran, membre du Comité internationale de la MMF et qui vient d'être élue au Parlement national du Guatemala comme représentante des mouvements sociaux.
Sandra Moran est une militante guatémaltèque des droits humains depuis son plus jeune âge (14 ans), ainsi qu’une « activiste musicale ». Elle fait partie du collectif Artesana, composé de 32 organisations, et qui fait le lien avec la Marche mondiale des femmes. Ce collectif s’occupe principalement des femmes et des enfants en prison et rassemble des groupes de femmes très diversifiés qui ont décidé de s’organiser de façon autonome pour créer des actions. Ce mouvement, basé sur les droits humains, est initié dans les années 2000, après 36 ans de guerre civile au Guatemala (1960-1996). À ses débuts, le mouvement a été considéré tout d’abord comme un droit à la vie, un droit à s’organiser.
Face à l’hostilité du gouvernement guatémaltèque à produire des lois égalitaires, le Collectif Artesana s’est intéressé aux théories féministes et a créé en 2004 des écoles afin d’éduquer politiquement ses membres ; construire une pensée politique contre le patriarcat, le capitalisme et le colonialisme ; et se définir comme des actrices politiques.
Ce mouvement se base sur le « Buen vivir », concept issu des peuples autochtones des Amériques. Celui-ci conçoit des relations harmonieuses entre les personnes et entre les personnes et la nature, promouvant donc une économie sociale renforçant la vie. Ainsi, en accord avec ce principe, d’après Sandra Moran, la résistance est quelque chose qui se construit : « Notre énergie n’est pas mise dans la confrontation, mais dans la construction. Ainsi, on construit des alliances avec d’autres groupes avec les groupes de femmes, etc… »
C’est en 2006 que le collectif Artesana rejoint la Marche mondiale des femmes, date à laquelle il n’y a toujours pas de loi au Guatemala sur l’égalité homme-femme.
Depuis fin avril, le Guatemala connait l’un de ses plus grands mouvements de contestation depuis la chute de l’ancienne dictature militaire. Près de 60 000 personnes se sont mobilisées dans la rue pour dénoncer la corruption du gouvernement et exiger la démission du président Otto Perez Molina. Ce mouvement a rassemblé une grande partie de la population guatémaltèque : syndicats, étudiants, ONG, organisations communautaires et environnementalistes. Il s’agit, d’ailleurs, de trois à quatre générations qui luttent ensemble. Selon Sandra Moran, l’ampleur de ce mouvement démontre la fin de la peur au Guatemala ! Les manifestants réclament la reconstruction du système politique guatémaltèque, la promotion des droits des femmes et la proposition des lois et des politiques. Enfin, cette crise politique, à quelques mois des prochaines élections, laisse présager un véritable changement au Guatemala.
C’est donc dans ce contexte que se mobilise le Guatemala dans la Marche mondiale des femmes de 2015.